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Souvenirs de pension de Denise, 1934-39 (5) : Les matières générales 2

15 avril 2022 Témoignages
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Nous remercions beaucoup Marie-Sophie MIOTTO qui nous a envoyé le recueil des souvenirs de sa grand-mère, Denise PUTFIN (PETIT 1934-39) qui a fréquenté les Maisons d'Écouen de 1934 à 1936 puis de Saint-Denis de 1936 à 1939. Nous continuons de la suivre dans ses souvenirs...

5. Les matières générales (2)

Le solfège - La musique

Il y avait des cours de solfège. Ceux-ci ne se faisaient pas par classe, mais par niveau et par conséquent tous à la même heure, en général le samedi dans la soirée (certaines n'avaient jamais fait de solfège). Ces cours comprenaient : la théorie musicale, le déchiffrage, la dictée musicale. Tous les ans il y avait un concours pour recruter les élèves de la chorale, mais étant donné mon manque d'oreille musicale et malgré de très bonnes notes en théorie et une voix convenable, je ratais toujours les épreuves de dictée musicale et de déchiffrage et n'ai jamais fait partie de la chorale.

Il y avait également pour les élèves qui faisaient du piano un concours comportant le déchiffrage d'une partition et l'exécution d'un morceau étudié d'avance. Les élèves - assez peu nombreuses - qui étaient reçues à ce concours obtenaient la gratuité des études de piano, ce qui n'existait pas pour les élèves de violon. 

Je faisais du violon. Au début, mon père avait cru comprendre que l'on ne pouvait faire que du piano, mais le jour de la rentrée, il apprit que l'on pouvait aussi jouer du violon et comme je l'apprenais depuis deux ans, il ne voulut pas que je change d'instrument malgré ma demande. Je ne repris donc mes cours qu'après les vacances de la Toussaint. Il y avait une heure d'étude de musique par jour. Les élèves qui n'en faisaient pas, à Écouen, allaient pendant ce temps à la lingerie et raccommodaient les bas, pendant que l'une d'entre elles faisait la lecture d'un livre à haute voix. Ce fut donc mon sort avant que j'aie eu rapporté mon violon.

Pour les études de musique, il y avait au dernier étage d'une des tours du château des petites pièces avec juste  un piano et son tabouret et au même étage, une grande salle nommée "étude de piano" où se côtoyaient une bonne dizaine d'instruments, ce qui donnait une cacophonie terrible quand chacune étudiait ses propres leçons. Il fallait s'y faire. Mais chacune avait une ou deux heures par semaine en chambre particulière pour étudier en toute tranquillité.

Pour les élèves de violon, qui étaient beaucoup moins nombreuses, nous avions toutes une salle d'étude individuelle. Au début de l'heure, nous allions chercher nos violons qui étaient rangés dans un placard du parloir avec nos sacs de musique et nous nous rendions dans la salle qui nous était attribuée sur un tableau d'affichage, car ce n'était pas toujours la même. Je n'ai jamais fait de prouesses en violon, car comme je l'ai dit, je n'avais pas l'oreille musicale et n'étais donc pas très capable de bien accorder moi-même mon violon. Pour pallier à cet inconvénient, je déchiffrais mes exercices et morceaux sur le piano qui se trouvait dans la pièce et me rendais mieux compte si je jouais faux. Je passais parfois plus de temps sur le piano que sur mon violon, si bien que plusieurs fois une surveillante est venue me demander si je faisais du piano ou du violon. Je lui répondais que je déchiffrais sur le piano pour me mettre la musique dans la tête. Elle n'insistait pas. Quand je suis rentrée en classe bleue, j'ai abandonné, disant à mon père que je perdais du temps, car à Saint-Denis, les élèves qui ne faisaient pas de musique étaient en étude. En réalité, ça ne me plaisait plus, c'était trop difficile. Mon père n'insista pas trop, je lui promis de reprendre après, mais je me suis contentée de rester sur mon acquis.

La gymnastique

Il y avait un gymnase avec tous les agrès : barres parallèles, échelle horizontale, corde lisse, corde à nœuds, cheval d'arçon, etc. Ce qui est courant maintenant dans les lycées et collèges, mais je n'en avais jamais vu. Pour la gymnastique, nous avions un costume spécial qui se composait d'un espèce de bermuda bouffant qui arrivait au-dessous du genou - mais souvent nous le remontions au-dessus du genou - les professeurs de gymnastique ne disaient trop rien, sauf si l'Inspectrice était dans le coin, alors en vitesse nous les redescendions. Par-dessus, nous avions une tunique retenue par une ceinture. Le tout couleur "caca d'oie" ! Nous devions garder nos gros bas beiges et bien sûr notre corset et des espadrilles aux pieds. Cela devait également nous rester pendant tout notre séjour dans les Maisons. 

Les cours qui duraient deux heures se divisaient en deux parties. Une première partie à l'intérieur avec les agrès, la deuxième en général à l'extérieur pour de l'athlétisme : courses, sauts etc. S'il pleuvait ou qu'il faisait vraiment froid, la séance de plein air était remplacée par de la gymnastique en salle, surtout exercices sur petits tapis, mouvements à l'espalier. J'aimais bien, mais je n'ai jamais été très bonne en barres parallèles, corde lisse, cheval d'arçon car je n'avais pas de force dans les bras !

Le dessin

Nous avions des cours de dessin. Pour cela il y avait un atelier. A Écouen, nous y allions toutes les semaines et le cours durait deux heures. Les cours consistaient à dessiner et à peindre une nature morte, un exercice d'imagination sur un thème donné ou parfois une élève posait pour nous. À Écouen, notre professeur se faisait beaucoup chahuter, elle n'avait aucune autorité - c'était d'ailleurs la seule - et nous nous amusions pendant les deux heures soit à la bataille navale ou autre chose dans le même genre, même lire un livre de la la bibliothèque et le temps passait sans que nous n'ayons rien fait ou pas grand-chose, car elle passait rarement au milieu de nous. Je me rappelle qu'une fois, nous avions à dessiner une série de casseroles en cuivre. Le dernier quart d'heure, je me mis au travail à grands coups de pinceau, je fis quatre grands ronds avec une queue et j'écrivis en gros au-dessus : CASSEROLES.

Elle me donna mon dessin à aller faire signer par Madame l'Inspectrice, laquelle m'infligea une journée de classe pour le dimanche suivant. J'expliquerai au chapitre des punitions en quoi cela consistait.

La couture

Toutes les semaines également, nous avions deux heures de couture. Au début de l'année, on nous remettait une pièce de tissu d'environ 40 cm de large sur 50 cm de long. Sur cette pièce, nous devions exécuter tout au long de l'année un ourlet, un surjet, une couture anglaise, un couture rabattue, des brides, des boutonnières, des jours échelles et ensuite, sur une autre pièce tous les points de broderie. bien sûr, chacune travaillait à son rythme. Quand l'un des exercices était terminé, nous allions le montrer et nous ne pouvions passer à l'exercice suivant que si c'était impeccable à tous petits points réguliers. Comme j'avais déjà fait cela l'année précédente pour le certificat d'études et que j'étais bonne en couture, je n'eus jamais à recommencer sauf pour les boutonnières ; là j'y ai passé un temps fou ! Au bout d'un nombre impressionnant de boutonnières ratées je fus enfin autorisée à passer à la broderie. Quand nous avions terminé le tout, ce qui prenait parfois plus d'une année à beaucoup d'entre nous, on nous taillait un corsage que nous devions exécuter entièrement à la main avec des jours à l'encolure - ce qui devait constituer une pièce de notre trousseau - mais je suis convaincue qu'aucune de nous ne s'en est jamais servie. Pendant que nous cousions en silence, l'une d'entre nous faisait la lecture d'un livre de bibliothèque à voix haute. Comme je lisais bien - paraît-il - à voix suffisamment haute et intelligible et qu'en plus j'étais assez souvent en avance dans mon travail, je lisais souvent. Nous nous relayions environ tous les quarts d'heure.




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